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Les plaques animées

La Cinémathèque française possède de très nombreuses plaques mécanisées pour lanterne magique, fabriquées entre le XVIIIe et le XIXe siècle. On y trouve les créations de presque tous les grands pays producteurs : France, Grande-Bretagne et Allemagne. La projection de ces plaques permettait d'offrir aux spectateurs les premiers spectacles d'images lumineuses et animées.

Peintes à la main, ces vues sur verre, fragiles incunables de l'animation, comportent généralement un système de double verre peint (superposé ou juxtaposé) qui permet de faire bouger le sujet représenté. Il existe aussi des mécanismes plus complexes, à manivelle, à obturation, à crémaillère ; parfois, les parties mobiles sont peintes sur de la corne transparente et sont mues par de fins mécanismes en laiton.

Dès son apparition en 1659 grâce à l'astronome hollandais Christiaan Huygens (1629-1695), la lanterne magique a projeté des vues animées : reprenant le thème de la Danse de mort de Holbein, Huygens a disposé deux plaques de verre l'une sur l'autre. Sur la première fixe se trouve le corps d'un squelette à qui il manque un bras. Sur la deuxième s'anime ce bras manquant qui joue avec un crâne. Ce genre de plaques se retrouvera jusqu'au XIXème siècle autour de lanterne de peur, l'autre nom de la lanterne magique. En 1850, on retrouve l'image d'un squelette peint sur les plaques animées de Newton. Si on tire sur le verre mobile, le squelette semble perdre tous ses os.

A partir de cette image fondatrice, qui annonce le Dancing skeleton de Walt Disney, de très nombreux peintres vont produire, par la suite, des milliers d'images mobiles. D'illustres scientifiques comme l'abbé Nollet vont décrire, dans leurs ouvrages, le principe de la plaque mécanisée. C'est le début de l'animation, du "cinématographe" en tant qu'écriture du mouvement.

Des mécanismes de tous genres, de plus en plus ingénieux, sont venus agrémenter les plaques de lanternes magiques dans une recherche sans cesse plus aboutie d'un mouvement dans l'image. Au cours du XIXème siècle apparaissent des plaques très élaborées : le choreutoscope, le chromatrope, le cycloïdrope, l'eidotrope, ou encore la "wheel of life". Le chromatrope, apparu au cours des années 1830, offre la vision de rosaces tournantes ; la wheel of life permet de projeter des vues animées selon le système du phénakistiscope de Joseph Plateau (1832).

L'intérêt de ces images, outre le fait qu'elles constituent les premiers pas du spectacle cinématographique, c'est qu'elles reflètent aussi la vie quotidienne de l'époque : petits métiers de Paris ou de Londres, magnifiques vues de pays étrangers, saynètes comiques sur le thème du couple ou des défauts humains, vues grotesques se moquant de certaines corporations... Certaines images étaient célèbres, comme celle du dormeur avalant un rat à chaque fois qu'il ouvre la bouche ; ou bien l'équilibriste, image apparue au XVIIIe siècle.

Ces plaques mécanisées sont encore peu connues : extrêmement fragiles, elles n'ont jamais été étudiées d'une façon approfondie. Ces images oubliées sont d'une excellente qualité artistique, peintes avec des couleurs éclatantes. Réalisée selon l'état du mécanisme ou de la plaque, leur réanimation constitue une sorte de voyage à rebours, plein de vie et d'animation, dans les siècles passés.